So crazy beautiful • { l. meester - prise }

Elle était belle. Dotée de cette beauté fragile, douce, celle qui nous fascinait par son naturel et sa candeur... Presque enfantine... Presque irréelle. Il craignait de la toucher, prisonnier de cette peur absurde de la tirer de ses songes, alors qu'elle avait le visage si serein. Elle ressemblait à un ange, surtout quand elle dormait ; ses jolies lèvres rosées s'étirant à peine dans un sourire rêveur. Son index effleura sa tempe, glissant sur sa joue, sur son menton, courant sur son épaule frêle ; redessinant avec douceur les courbes délicates de la jeune fille endormie à ses côtés. « Léandre... » son prénom lui échappa dans un faible murmure, et elle ouvrit les yeux, lui adressant un sourire embarassé. « Qu'est-ce que tu fais ?... »
« Je te regardais dormir... Pardonne-moi, je ne voulais pas te réveiller. » Elle posa sa main contre sa joue, et il ferma les yeux, savourant le contact exquis de sa peau soyeuse contre la sienne. Il ne la méritait pas et elle n'avait rien à faire avec un être comme lui ; c'était une évidence. Elle était si humaine. Si naïve. Elle ne soupçonnait pas à quel point son passé était sombre. Et lui, aveuglé par son désir, si stupide, il l'attirait avec lui dans ses ténèbres à la quiétude fort trompeuse. Il pouvait avoir n'importe quelle fille ; mais il fallait que son coeur batte pour le plus ingénu des petits agneaux, la plus candide des humaines ; celle qui aurait été prête à donner sa vie pour sauver celle d'un autre. Généreuse, rassurante, noble. Elle semblait avoir un coeur en or. Et elle était son opposé le plus parfait ; tout son contraire. Sans même le savoir, elle se laissait étreindre par une brume fugace qu'était son amour. Son coeur était fermé, aussi froid qu'un morceau de glace. Pourtant, il aimait sa présence. Il aimait la douceur de ses yeux ; celle qui brûlait douloureusement les abîmes de son âme trop sombre pour pouvoir comprendre ce qu'était l'amour. Il aimait aussi son petit rire cristallin, et la façon dont elle frissonnait lorsqu'il laissait ses doigts parcourir son dos dénudé. Elle s'abandonnait aux caresses de l'obscurité même. Sans se douter qu'un jour où l'autre, ces douces ténèbres allaient l'étouffer. Aura-t-il le courage de lui réserver le même sort qu'il avait réservé pour toutes celles avant elle ? Trouvera-t-il en lui la force nécessaire pour en finir, une fois que sa tendresse l'aura lassée ? La regarder, en sachant qu'un jour ou l'autre, la vie dans ses beaux yeux s'éteindra, et que ce seront ces mêmes mains ; celles qu'il aimait tant faire courir sur son corps encore juvénile - qui lui voleront le dernier souffle. « Rendors toi, mon amour... » susurra-t-il à son oreille, lui dérobant un baiser presque chaste. Cette même nuit, alors qu'elle dormait paisiblement, il avait quitté Londres, lui laissant une lettre, et lui demandant de ne jamais chercher à le revoir.